Que tes ennemis aient le sort de ce jeune homme…

« ‘Que tes ennemis aient le sort de ce jeune homme,
comme tous ceux qui se sont dressés contre toi,
mon Seigneur le roi, pour te faire du mal !’
Alors le roi fut bouleversé et il se mit à pleurer. »
2ème livre de Samuel 18,9-10.14.25-25.30.

Nous touchons ici la complexité de l’âme humaine et ses contradictions, ou plutôt peut-être son incapacité à gérer toutes les dimensions de ce qui lui arrive. David est poursuivi par son fils qui veut le détrôner. Il s’enfuit pour éviter la guerre et les pertes humaines, c’est une attitude assez remarquable. Seulement le fils est belliqueux et tient à écraser les fidèles de son père. Malheureusement pour lui, il heurte une branche tandis qu’il courre avec son cheval, et les fidèles de son père en profitent pour l’achever.
Quand on annonce sa mort au vieux roi, David ne réagit pas avec soulagement comme les siens le pensaient, mais prend le deuil de son fils avec une immense douleur. De telle sorte que, ce jour-là, la victoire de son armée se transforma, pour ainsi dire, en deuil ! Entre le soulagement de ce que la menace est annulée et la douleur de la perte de son fils, David choisit de laisser parler ses entrailles.
Je ne veux ici que penser à l’image de Dieu Père. Sans aucun doute, comme pour David, son amour pour nous dépasse tout ce qu’on peut imaginer ; il souffre plus que nous de nos défauts, de nos péchés, de notre incapacité à l’aimer et à le respecter. Mais plus que tout, il craint notre mort ! Non pas notre mort corporelle, inévitable, mais il a peur que nous puissions mourir spirituellement, c’est-à-dire nous écarter définitivement de sa vie, et, du coup, de notre propre vie en Lui. La douleur de David me fait imaginer la douleur de Dieu, à cause de nos refus. Si nous savions, sûrement, nous n’oserions pas l’offenser en quoi que ce soit. Mais pourquoi restons-nous dans l’ignorance Jésus ne nous a-t-il pas tout dit ?
Seigneur, personne autant que ton Père souhaite notre bonheur et que nous possédions avec Lui la vie éternelle ! Il nous aime tellement plus que David ne pouvait aimer son fils Absalon. Donne-moi de le comprendre un peu mieux aujourd’hui, de lui offrir ma vie, et de quitter de bon cœur tout ce qui lui déplait.
† Emmanuel Lafont
Evêque de la Guyane