« Il m’a dit : ‘tu es mon serviteur, Israël 

en toi je manifestai ma splendeur’.

Et moi je disais : ‘Je me suis fatigué

Pour rien, c’est pour le néant’. »

Isaïe 49,1-6.

Le deuxième chant du Serviteur dans le livre d’Isaïe contribue à nous faire entrer davantage dans les sentiments qui habitaient le cœur de Jésus au moment de sa passion. Le cœur humain de Jésus a dû se battre, lutter contre lui-même pour assumer le destin de la mort injuste et abominable. N’a-t-il pas eu le sentiment, à un moment donné, de s’être battu pour rien ? N’a-t-il pas dit à ses disciples, à la fin du grand sermon sur le pain de vie, « allez-vous me quitter vous aussi ? » (Jean 6,67). N’a-t-il pas frémi intérieurement avant d’entrer dans sa passion ? (cf. Jean 12,27 ; 13,21).

Jésus est demeuré humain jusque dans sa souffrance, l’acceptation douloureuse de son destin, et sa réaction devant l’échec, le rejet et la mort. Vraiment, nous avons un grand prêtre compatissant, car il a été « exaucé en raison de sa soumission. Tout Fils qu’il était, il apprit par ses souffrances l’obéissance » (Hébreux 5,8).

Nous célébrerons, le 11 avril prochain, la fête d’une jeune femme italienne, sainte Gemma Galgani, dont la vie courte (elle est montée vers Dieu, à 25 ans, le 11 avril 1903) fut marquée par la souffrance. Elle avait entendu da la bouche de Jésus lui-même cette invitation étonnante : « apprends la souffrance, car la souffrance apprend à aimer ». Elle est entrée progressivement dans les sentiments et l’expérience du Christ et par là elle a contribué d’une manière immense au salut du genre humain. Il ne nous est pas demandé à tous de suivre ce chemin particulier. On y est appelé par Dieu. Mais il nous est demandé, à tous, de vivre notre vie comme un don de Dieu et une offrande à sa majesté, en rémission des péchés.

Seigneur Jésus, Job avait répliqué à sa femme qui lui conseillait de se révolter : ‘Nous acceptons le bonheur comme un don de Dieu. Et le malheur, pourquoi ne l’accepterions-nous pas aussi ? » (Job 2,10). En ce temps de passion où nous contemplons le Christ entrant dans son destin avec la puissance de l’Esprit, apprends-nous à tout regarder, dans notre vie, comme un don de toi et une offrande à ta majesté.

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane