C’est en Lui que nous avons la vie, le mouvement et l’être

« Or, ce que vous vénérez sans le connaître, voilà ce que, moi, je viens vous annoncer. Le Dieu qui a fait le monde et tout ce qu’il contient, lui qui est le Seigneur du ciel et de la terre, n’habite pas les temples construits par l’homme, et ne se fait pas servir par la main des hommes. Il n’a besoin de rien, lui qui donne à tous la vie, le souffle et tout le reste. »

Actes des Apôtres 17,15.22 – 18,1.

Paul continue son voyage missionnaire au milieu de bien des déboires. On est loin de l’enthousiasme des débuts, lorsque les gens se convertissaient par milliers à la fois… La condition missionnaire de Paul ressemble à la nôtre, elle n’est pas facile. Raison de plus pour regarder comment il s’y prend.

Il est arrivé à Athènes, la capitale de la culture grecque dans ce qu’elle a de plus raffiné, de plus abouti, culturellement et intellectuellement. L’apôtre est étonné de voir la profusion de statues, représentant des divinités de toutes sortes. Et les Grecs, si intelligents, mais si superstitieux aussi, semble-t-il, avaient tellement peur d’oublier et donc d’offenser un dieu méconnu, qu’ils ont fabriqué une statue dédiée au dieu potentiellement oublié : « au dieu inconnu ! » est-il marqué devant la statue.

Paul est astucieux, il s’engouffre dans cette porte ouverte ! Il désigne ce Dieu inconnu comme étant le Père de Jésus Christ et annonce le salut apporté par son fils. Paul ne fait pas que saisir la perche qui lui était tendue, mais il va plus loin encore : il parle à des grecs avec un grec parfait, et de surcroit philosophique : tout ce que les Grecs aiment entendre ! Il ne se réfère pas à la Sainte Écriture, que les Athéniens ne connaissent pas, il utilise la langue et les expressions des philosophes. Nous sommes très loin du style du discours à Antioche de Pisidie (cf. Actes 13,14-41).

En voici quelques exemples : « Il a fait le monde et tout ce qu’il contient… Il donne à tous la vie, le souffle et tout le nécessaire… C’est en Lui que nous avons la vie, le mouvement et l’être… La suite du discours le montrera plus nettement encore. Elle manifeste que Paul connait la culture des gens auxquels il s’adresse. Il est capable de s’adapter à la culture de l’auditoire ! La mission, pour lui, consiste vraiment à prendre les gens là où ils sont, avec leur culture, leur langue, leur histoire, leurs désirs et leurs craintes. Il continue ainsi de servir la « venue dans notre chair du Fils de l’Homme. »

Cela nous rappelle les résolutions prises au cours de notre Synode diocésain de Février 2020 à propos de la « conversion culturelle » demandée à notre Eglise :

Le rêve culturel

  1. Nous proposons d’élaborer et de nous former à une meilleure compréhension que notre mission ne peut se vivre que dans un dialogue respectueux de tous et des différentes cultures des peuples de Guyane (89%).
  2. Nous décidons de travailler pour établir une liturgie, des rites culturels et des chants mieux en harmonie avec la richesse des différents cultures de la Guyane (91%).
  3. Nous continuerons de multiplier des échanges entre les différentes cultures au sein de notre Eglise (95%)
  4. Nous invitons chaque catholique à bien connaitre sa culture et ses racines, pour entrer dans un dialogue à égalité de cohérence avec les autres cultures (88%).
  5. Nous reconnaissons que c’est aux peuples autochtones eux-mêmes de décider de ce qu’ils veulent préserver et ce qu’ils veulent changer, à la lumière du message de Jésus (88%).

Seigneur Jésus, nous te remercions pour l’exemple missionnaire laissé par l’apôtre Paul, lui qui a su si intensément harmoniser une connaissance intime de ta personne avec une capacité d’adaptation culturelle et intellectuelle hors du commun envers ses auditeurs. Puissions-nous, à notre tour, grandir encore en intimité avec toi et en solidarité avec les peuples auxquels tu nous envoies.

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane