J’ai un peuple nombreux dans cette ville

PREMIERE LECTURE

VENDREDI DE LA SIXIEME SEMAINE DE PÂQUES

 

« À Corinthe, une nuit, Paul eut une

vision : ‘Je suis avec toi, et personne

n’essaiera de te maltraiter, dans cette

ville j’ai à moi un peuple nombreux.’»

Actes des Apôtres 18,9-18.

Le livre des Actes continue de nous donner une image réaliste de la mission et du missionnaire. La mission n’est pas facile. Ça n’est pas parce que l’apôtre porte une bonne nouvelle que tous veulent l’écouter. Il rencontre souvent l’indifférence, parfois le mépris et même le rejet, la persécution. Il lui arrive d’avoir peur, d’être paralysé par la crainte.

Dans la tentation du découragement, l’apôtre retrouve la présence du Seigneur. Par la prière et la méditation de la parole qui rendent Dieu présent, se profile l’antidote de la crainte : le courage et l’assurance de la fécondité du ministère apostolique, puisque c’est Dieu qui est à la manœuvre.

L’expérience de Paul à Corinthe éclaire un aspect difficile de la mission : elle divise là où elle souhaiterait unir. Nous voyons successivement les Juifs trainer Paul devant le tribunal romain, puis les Juifs se retourner les uns contre les autres. La Parole est comme un sabre à deux tranchants (Hébreux 4,12) qui révèle les lumières et les ténèbres en chacun de nous, comme dans nos sociétés et même nos communautés ecclésiales. Il ne faut ni s’en offusquer, ni essayer d’y échapper en se coupant des autres. Ici, la parabole d’ivraie et du bon grain (Matthieu 13,24-30) est essentielle à notre équilibre : les deux sont là, ensemble, ils pousseront jusqu’à la moisson. Alors le mal sera détruit ! Jusque-là, la présence du mal est un lieu de purification de nous-mêmes. C’est ainsi que du mal Dieu tire du bien.

Dieu vient donc rendre courage à son apôtre. Il l’engage à ne pas baisser la garde, mais à continuer tranquillement, parce que le peuple de Dieu est nombreux dans cette ville. Le regard de Dieu est essentiel, puisque la mission, fondamentalement, demeure son œuvre. Dieu n’empêche pas les épreuves, les maltraitances et les persécutions. Mais ces épreuves n’entravent pas le succès de la mission.

J’aime cette belle expression de Paul. J’y pense chaque jour ! Que je sois à Cayenne, Rémire-Montjoly, Saint Laurent ou toute autre localité, petite ou grande, j’entends le Seigneur me dire : « mon peuple est nombreux dans cette ville, n’aie pas peur ! »

Seigneur Jésus, nous savons bien que la mission n’est pas notre œuvre, mais nous avons besoin de nous le redire sans cesse. Nous savons que Dieu est présent, mais nous agissons comme si tout venait de nous. Nous savons que tu as un peuple nombreux dans toutes nos cités et dans nos campagnes. Et pourtant notre élan missionnaire est si pauvre, souvent ! Rends-nous le force de la foi de Paul !

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane