Ninive est dévasée ! Qui la plaindra ?

PREMIERE LECTURE

VENDREDI, DIX-HUITIEME SEMAINE DU TEMPS DE L’EGLISE – 2 

 

« Malheureuse Ninive, la ville sanguinaire remplie de perfidie,

pleine de rapines, elle qui ne lâche jamais sa proie.
Écoutez ! Claquements des fouets, fracas des roues,

 galop des chevaux, roulement des chars ! »

Nahoum 2,1.3 et 3,1-3.6-7.

 

Avec le prophète Nahum, nous repartons en arrière par rapport Jérémie dont nous venons de méditer la vie et le message. En effet, l’occasion des oracles de Nahum nous est fournie par un événement très précis, à savoir la vision de la chute de Ninive, capitale de l’Assyrie. On peut dont dire que ce prophète vécut au 7ème siècle avant Jésus-Christ, entre les prophètes Isaïe et Jérémie. Nahum cite Thèbes (cf. Nahoum 3,8), détruite vers 667 avant J.C. Ninive tombera en 612. Le ministère de Nahoum se situe entre ces deux dates et donc entre Isaïe et Jérémie.

2,14

La joie qui est la sienne à propos de la perspective de la ruine de Ninive se base, tout simplement, sur les profondes injustices et les crimes commis dans et autour de ce pays par les princes Assyriens (cf. Nahoum 1,11 ; 3,1-4). Peu de temps avant 612, l’Assyrie, qui avait détruit le royaume d’Israël en 721 avant J.C. tenait le royaume de Juda et Jérusalem sous sa coupe. Nahum se réjouit d’entrevoir la chute d’un tyran.

Ce faisant le prophète confirme ce que déjà plusieurs prophètes ont bien compris. Le Dieu d’Israël et de Juda n’est pas un dieu parmi les autres. Il est l’Unique. Il gouverne toute la terre : « Me voici contre toi – oracle du SEIGNEUR de l’univers » (Nahoum 2,14 ; 3,5). Les prophètes, bien avant les maître de la loi, les scribes et les prêtres, ont compris que Dieu seul est Dieu ! « Devant sa face, la terre est bouleversée, tout l’univers habité. Face à son indignation, qui tiendrait ? » (Nahoum 1,5-6).

En ce mois d’août 2020 où nous faisons nous débattons contre un virus qui ne connait pas de frontières, qui renait de ses cendres aussi rapidement que l’éclair, qui passe d’une personne à l’autre sans aucune retenue, nous devons faire mémoire de ce Dieu qui ne veut pas de l’injustice, de l’idolâtrie – ancienne ou moderne, des statues ou de l’or – et qui voit le malheur dans lequel sombre aujourd’hui un système dont nous étions si fiers, financier hospitalier, économique, scientifique… au Liban, au Venezuela, en Centrafrique… ce virus nous rappelle que l’injustice, la perfidie, la corruption et l’esprit dominateur sont les premières causes des horribles conflits qui ensanglantent le monde.

Le message du prophète est une invitation à la joie, pourtant, car le Seigneur finit toujours par vaincre le mal. L’image de la ville impie de Ninive, à genoux, est un signe de cette victoire sur le mal extérieur et intérieur. Cependant, par certains côtés, cette jubilation sur la défaite programmée de l’ennemi, pour humaine qu’elle soit, se trouve en attente de l’esprit de l’Evangile. Avec Jésus, je ne peux même plus me réjouir de la défaite de mon ennemi (cf. Matthieu 5,38-48 ; Romains 12,19-21 « mais si ton ennemi a faim, donne-lui à manger ; s’il a soif, donne-lui à boire. : en agissant ainsi tu entasseras sur ta tête des charbons ardents. » (12,20).

Seigneur fais nous revenir à toi ! Dans ta miséricorde, pardonne-nos péchés et les péchés de nos pays et de nos patries. Fais que ta loi divine de miséricorde inspire non seulement nos vies personnelles mais la vie de nos cités et de nos nations, alors, ta paix resplendira comme le soleil de midi dans nos familles, nos cités et sur toute la surface de la terre

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane