Fils d’homme, ce qui est devant toi, mange-le, mange ce rouleau !

PREMIERE LECTURE

MARDI, DIX-NEUVIEME SEMAINE DU TEMPS DE L’EGLISE – 2

 

« Le Seigneur me dit : ‘Fils d’homme,

mange ce qui est devant toi,

mange ce rouleau, et va parler

à la maison d’Israël.’ »

Ézéchiel 2,8 – 3,4

Nous sommes entrés, avec la dix-neuvième semaine du temps de l’Eglise, dans une longue méditation du prophète Ézéchiel qui va durer quinze jours, le temps de connaître un peu mieux celui qui fut prophète avec et après Jérémie, et dont la majeure partie de la vie s’est déroulée en exil à Babylone. Parce que hier lundi était le 10 août, fête de Saint Laurent, nous n’avons pas médité sur la première vision du prophète, Ézéchiel 1,2-28.

CE SERA POUR VOUS UN BON EXERCICE, FRUCTUEUX A LA LONGUE, DE LIRE L’INTRODUCTION AU LIVRE D’EZEKIEL DANS VOTRE BIBLE.

Vous y apprendrez qu’Ézéchiel était prêtre, fils du prêtre Bouzi (cf. 1,2). Il a fait partie de la première fournée de prisonniers emmenés en Exil en 597 avant J.C. (Cf. 2 Rois 25,1-7). La deuxième interviendra dix ans plus tard, en 587, avec l’incendie du Temple de Salomon et la destruction des remparts (cf. 2 Rois 25,8-21). Ézéchiel vivra les dix dernières année du royaume de Juda depuis Babylone, parmi les exilés, alors que Jérémie était resté à Jérusalem (cf. Jérémie 29,1-23 ; 32,1-44 ; 34,1 – 35,19).

Le texte proclamé aujourd’hui (Ézéchiel 2,8 – 3,4) fait partie de ce que l’on appelle l’envoi en mission du prophète (Ézéchiel 2,1 – 3,21). Cela vaut la peine de tout lire, c’est très court. Ézéchiel est envoyé ver le peuple d’Israël dans une période très éprouvante de son histoire. Il y jouera un rôle essentiel que nous découvrirons au fil des jours. Il doit se préparer à ne pas craindre la parole de cette « nation rebelle » (cf. 2,6). Comment ? En prenant le rouleau qui lui est tendu et en le mangeant ! (2,9 – 3,3). C’est tout simple : ce que le prophète doit proclamer, ce n’est pas ce qu’il pense, ni ses sentiments, c’est la Parole de Dieu ! Toute la Parole, et rien que la Parole.

Deux fois, dans l’Écriture sainte, nous trouvons l’ordre donné à un prophète de manger le rouleau de la Parole. Ici, en Ezéchiel, et dans l’Apocalypse de Jean, 10,9-10. Souvent les psaumes évoquent le désir, la pratique de manger ou de dévorer la parole et la loi de Dieu : cf. le Psaume 119,43.103.131. Ces images très fortes nous appellent à comprendre que la Parole de Dieu est une nourriture ! Une nourriture qu’il ne s’agit pas d’avaler, mais de savourer ; il ne faut pas l’engloutir, mais la garder dans son palais, la mastiquer, en quelque sorte, afin qu’elle exsude tout son suc, tout son parfum, toute sa richesse.

La Parole de Dieu doit pénétrer au plus profond de notre âme, tout comme la nourriture doit subir cette transformation que la mastication rend possible. Nous ne sommes pas en mesure de la goûter d’un seul trait, de lui laisser nous transformer sans lui donner le temps de s’unir à notre âme d’une manière toute particulière, intime, silencieuse, contemplative.

Alors, mais alors seulement, rassasiés de cette Parole, nous pourrons faire ce que le Seigneur nous demande : « va parler à la maison d’Israël. » Alors, en effet, ce ne sera pas nous qui parlerons, mais le Seigneur, qui aura pris possession de nos cœurs par sa Parole, et son Esprit qui ouvre nos cœurs à l’intelligence des Ecritures. Le monde attend de nous non pas notre parole, même notre parole sur Dieu, mais il attend la Parole de Dieu !

Seigneur Jésus, je te rends grâce pour l’amour de la Parole que tu as mis dans mon cœur. Tu le sais, elle est la lumière de ma route et la lampe sur mes pas. Tu m’as fait cette grâce insigne, ne me laisse pas tomber dans la torpeur ou la fatigue. Conduis moi jusqu’à ton peuple, et, en ton Nom, je parlerai ta Parole.

† Emmanuel Lafont

Evêque de Cayenne