Souffle sur ces morts, et qu’ils vivent !

PREMIERE LECTURE

VENDREDI, VINGTIEME SEMAINE DU TEMPS DE L’EGLISE – 2

 

« Prononce un oracle sur ces ossements.

Tu leur diras : ‘Ossements desséchés,

écoutez la parole du Seigneur : Je vais faire

entrer en vous mon Esprit et vous vivrez. »

Ezéchiel 37,1-14.

Méditons aujourd’hui une des plus belles visions d’Ezéchiel. Elle annonce la fin de l’Exil à Babylone et le retour dans la terre des ancêtres. Sa force graphique est extrême. Le prophète se trouve dans une immense vallée couverte d’ossements (37,2) : c’est le peuple juif, en exil loin de sa terre, qui ressemble à des morts ! (Cf. 37,11). Ni Dieu ni Ézéchiel ne pensent à des personnes individuelles, ils n’offrent pas ici une prophétie sur notre résurrection à la fin du monde, la vision concerne le peuple juif et son avenir immédiat.

Je parle d’eux au pluriel, car la vision se présente sous la forme d’un dialogue entre le prophète et son Dieu. Le Seigneur, qui sait parfaitement ce qu’il veut accomplir, s’assure de l’intelligence et de la coopération de son serviteur. Il l’interpelle par trois fois : « Fils d’homme » (37,3.9.11). Il lui demande de prophétiser trois fois également : une fois aux ossements (37,4),  une fois à l’esprit (37,9), une fois au peuple tout entier (37,12).

On s’y croirait, dans ce cliquetis des ossements, cette poussée de chair, de nerfs et de peau, ce rassemblement inouï d’un cimetière qui se remet à vivre ! On s’y croirait, dans ce don de l’Esprit qui fait de ces os desséchés une armée formidable et spirituelle, animée et conduite par Dieu lui-même. Les plus grands artistes ont peine à dépeindre cette geste, tellement elle est dynamique et ne se laisse saisir que dans son mouvement même. Un tableau est trop faible. Il y faut du cinéma. Je n’ai pas trouvé d’image assez belle ! C’est vrai que les os n’ont pas beaucoup de couleurs…

Dieu s’y reprend à deux fois pour que ces os redevienne une armée immense (37,10). Ça ne vous étonne pas ? Une fois où il promet déjà l’esprit – le souffle, la vie ! – (37,5-6) ; et une fois où l’esprit vient de nouveau, des quatre vents « souffle sur ces morts, et qu’ils vivent ! » (37,9-10). Comme si cette formidable revitalisation des ossements ne pouvait êtres simplement humaine, terrestre. Elle ne pouvait être que « spirituelle ».

Qu’il est bon d’entendre ce dialogue et de voir cet exploit de Dieu ! Alors que nous traversons une période difficile, où il nous faut avancer masqués, où nous ne savons pas de quoi demain sera fait, nous avons une double promesse et – peut-être – un avertissement : promesse de résurrection, de salut, d’élimination de cette pandémie mortelle mais en même temps l’avertissement qu’à moins de « renaitre de l’Esprit » si je peux m’exprimer ainsi, nous risquons de retourner en arrière ; nous n’aurons rien appris ; reprendre la vie d’avant ? C’est reprendre le chemin qui conduit à la mort ; LA SORTIE DE CETTE EPIDEMIE NE PEUT ÊTRE QUE SPIRITUELLE.

Et puis, une fois encore, nous sommes avertis que tout ceci est décidé par Dieu pour qu’il se fasse connaître, lui le Rédempteur et Sauveur. « Alors vous saurez que je suis le Seigneur ! » (37,14). Ezéchiel nous sert, une fois encore, ce leitmotiv de l’action de Dieu : sa gloire et sa miséricorde, et non notre totale absence de mérite. Tout est de Lui, par Lui et pour Lui, A Lui l’Honneur, la Gloire et la Puissance pour les siècles des siècles, Amen !

Seigneur Jésus, dans le passé déjà tu as accomplis une œuvre merveilleuse en nous délivrant de la mort du péché et en répandant sur nous ton Esprit Saint ; en protégeant ton peuple, et ton Eglise, au long de son chemin sur la terre. Et nous voyons dans la prophétie d’Ezéchiel l’annonce voilée de la résurrection des corps et de ce monde à venir où tu nous entraineras dans un face à face d’amour avec ton Père, toi-même, l’Esprit, Notre Dame et tous les saints. Nous ne savons pas comment te remercier, sinon en nous laissant conduire, dès aujourd’hui, par ton Esprit. Accorde-nous la vraie docilité à ton Esprit !

Seigneur, fais-nous sortir de cette pandémie à travers une résurrection spirituelle.

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane