Rendez à Dieu ce qui est à Dieu

EVANGILE

29ème DIMANCHE DU TEMPS DE L’EGLISE – A

« Est-il permis, oui ou non, de payer l’impôt à l’empereur ? »

Matthieu 22, 14-21.

Cette fois, les pharisiens tiennent conseil pour prendre Jésus au piège. Ils lui envoient deux disciples, joints à de gens de chez Hérode. La question posée semble imparable. Si Jésus dit oui, il pourra être accusé de collaboration avec l’occupant haï. S’il dit non, il sera regardé comme un rebelle et un fauteur de trouble contre l’ordre établi. L’empereur n’est pas, tant s’en faut, le chef légitime du peuple juif. Il est le chef des occupants romains. L’impôt qu’il réclame n’a pas pour objet de garantir le bien-être du peuple juif, mais celui de Rome la lointaine. Comme c’est la règle, les occupants se paient sur le dos de ceux qu’ils oppriment.

Jésus ne donne pas sa réponse tout de suite. Il réclame, astucieusement, la monnaie de l’impôt. Le piège alors se referme sur ceux qui le tendaient, car l’image de cette monnaie, c’est l’empereur. Eh bien, dit Jésus : « Rendez-lui ce qui est à lui ! » Mais il ajoute « Et à Dieu ce qui est à Dieu ! » la formule lapidaire. Elle n’a jamais cessé de susciter des interprétations multiples au cours des âges, notamment en termes de partage d’autorité : aux Césars de ce monde l’autorité sur tout ce qui concerne le « profane », au Dieu ce qui relève de l’Esprit. Comme si les deux domaines n’étaient pas liés, comme si quelque chose échappait à l’autorité de Dieu !

Bien sûr, le Créateur a créé les hommes libres. Mais c’est une liberté destinée à choisir le bien ! Dès que tu choisis le mal, tu t’en rends esclave. Nous sommes esclaves de tes péchés, nous ne le savons que trop. L’autorité politique elle-même n’est légitime que dans la mesure où elle ne conduit pas au mal :  dans tous les cas, notre conscience, bien formée, demeure notre boussole. Lorsqu’il y a conflit entre Dieu et César, « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Pierre devant Conseil suprême, Actes 5,29). César n’est que le « lieutenant » de Dieu. Il demeure sous son autorité.

Car, et c’est ce qui sous-tend la réponse de Jésus, rien n’échappe à l’autorité de Dieu. Y aurait-il, dans l’univers, quelque chose qui ne serait pas à Lui ? n’aurait-il pas le contrôle ultime sur tout et sur tous ? y aurait-il quelqu’un ou quelque chose que nous ne devrions pas Lui présenter, lui rendre ?

« A ces mots ils furent tous étonnés et, le laissant, ils s’en allèrent » (Matthieu 22, 22). Il est curieux d’ailleurs que ce verset ne fasse pas partie de la proclamation de l’Evangile de ce dimanche. Car il indique que le message a atteint son but. Le piège a été déjoué. À l’illusion d’une autonomie sans fondement, Jésus a précisé l’ordre hiérarchique inhérent à la création tout entière. Dieu a donné une autonomie qui n’est pas sans bornes ni sans règles : « Tu peux manger les fruits de tous les arbres du jardin ; mais l’arbre de la connaissance du bien et du mal, tu n’en mangeras pas » (Genèse 2,16-17). Que l’homme ne succombe pas à la tentation de se faire « comme des dieux » (Genèse 3,4), fût-il empereur !

Seigneur Jésus, tu as dit : « ceux que vous faites à l’un de ces petits qui sont à moi, c’est à moi que vous le faites ». Fais-moi comprendre, aujourd’hui, que tout acte de charité envers mes frères n’est rien d’autre que de rendre à Dieu ce qui est à Dieu !