Seigneur, donne moi ton humilité, s’il le faut par des humiliations

ÉVANGILE

MARDI, 2ÈME SEMAINE DU CARÊME

« Ne donnez à personne sur la terre le nom de père, car vous n’avez qu’un seul père qui est dans les cieux. »

Matthieu 23, 1-12.

Nous sommes aujourd’hui au cœur d’un des chapitres les plus durs du Nouveau Testament. Il nous présente une violente diatribe de Jésus contre les scribes et les pharisiens. Il leur reproche de dire et de ne pas faire (Matthieu 23,3). Son discours est d’autant plus sévère qu’il est, par bien des côtés, proches d’eux. Souvent, en effet, la colère est le signe d’un amour déçu. Personne ne se met en colère contre des gens qui n’ont aucune importance dans sa vie. Leur comportement lui est totalement indifférent. Mais voir une personne que l’on aime transgresser ce qui nous tient à cœur est insupportable.

Lorsque, dans l’Ancien Testament, il est question de la colère de Dieu, il n’est pas difficile d’y voir la déception profonde que le Seigneur éprouve à propos du peuple qu’il aime « En quoi vos pères m’ont-ils trouvé injuste, eux qui se sont éloignés de moi… ? Ils m’ont abandonné, moi, la source d’eau vive » (Jérémie 2,5.13) ; « Va, mon peuple, rentre dans tes maisons, ferme sur toi les portes ; cache-toi un court instant, pendant que passe ma colère » (Isaïe 26,20). La colère de Dieu est à la mesure de sa miséricorde qui elle, est de toujours : « Reviens, infidèle Israël ! – oracle du Seigneur, je ne ferai pas tomber sur vous ma colère car je suis bon – oracle du Seigneur et je ne garde pas rancune à jamais » (Jérémie 3,12).

Au cœur de son discours, Jésus invite ses disciples à ne pas se faire appeler rabbis (docteurs) ou maîtres, et à ne donner à personne le nom de père. Il est intéressant de noter que la formulation n’est pas la même dans le premier et le troisième cas (ne vous faites pas appeler) et dans le second (n’appelez personne).

Faut-il prendre cette interdiction au premier degré ? Certains le pensent et ils nous accusent, nous prêtres, de ne pas respecter le commandement de Jésus. Mais leur interprétation n’est pas évidente. D’ailleurs, les trois titres sont donnés à des êtres humains dans des circonstances variées sans que personne n’y voit à redire. Ce que Jésus a en tête, c’est l’usurpation d’un titre par des gens qui ne reconnaissent pas que Dieu est à l’origine de tout pouvoir, de toute science, et de toute paternité. Usurper les titres de Dieu, c’est les appliquer en dehors de toute référence à celui dont tous ces titres tirent leur origine.

Nous avons tous la tentation du « pharisaïsme » c’est-à-dire de nous montrer pieux aux yeux du monde, parfois de manière ostentatoire, et d’en tirer le droit de critiquer, de juger, d’être donneur de leçon. Naturellement, c’est plus grave lorsque la fonction dans l’Église est plus haute, que ce soit l’évêque, ou le prêtre, ou les responsables des services dans l’Église.

SEIGNEUR JÉSUS, DONNE-MOI TON HUMILITÉ, S’IL LE FAUT PAR LES HUMILIATIONS.

Seigneur, fasse que jamais je n’usurpe ta dignité en reniant que tu es l’origine, le modèle, l’excellence de toute vérité, de toute famille et de tout pouvoir et ton Père de toute paternité.

Mgr Emmanuel Lafont