Ce que Jérémie a entendu, Jésus l’a entendu également

PREMIÈRE LECTURE

VENDREDI, 5ÈME SEMAINE DE CARÊME

« Moi, Jérémie, j’ai entendu les menaces de la foule : ‘Dénoncez-le, l’homme qui voit partout la terreur !’ Mes amis eux-mêmes guettent mes faux pas »

Jérémie 20,10-13.

Nous méditons aujourd’hui la dernière des « confessions de Jérémie », ces prières, ces plaintes et ces cris d’espoir qui ont jalonné la vie du prophète (11,18-23 ; 12,1-6 ; 15,10.15-20 ; 17,14-18 ; 18,18-23 ; 20,7-13.14-18).

Elles me font penser à l’agonie de Jésus au jardin des Oliviers. Rien n’est simple, et le prophète passe par des moments vraiment difficiles, pendant lesquels il oscille entre souffrance et confiance, sentiment d’abandon et certitude de la présence divine auprès de lui.

Pour bien comprendre ce que je dis, je vous invite à ouvrir votre Bible et à lire toute le « confession » du chapitre 20,7-13.14-18.

Ce que Jérémie a entendu, Jésus l’a entendu également. Il a pressenti la décision de l’éliminer ; il a vu ses amis l’abandonner, par dépit ou par incompréhension devant son comportement étrange ; il s’est trouvé totalement isolé devant les menaces, au point de crier vers Dieu son désarroi. Jérémie est un précurseur du Christ, dont il annonce et personnifie le drame autant que la solitude et la prière.

Car de même qu’il s’est trouvé en butte à des chefs, de même Jésus : « Les Juifs allèrent chercher des pierres pour le liquider » (Jean 10,31). Quant à ses disciples, c’est peu dire que de noter leur aveuglement devant ce qui se tramait.

Dans une situation comme dans l’autre, la décision de tuer est totalement injustifiée. Rien ne peut être retenu contre les deux hommes, sinon le fait que leur message est un appel à une conversion totale mais rejetée, refusée par les auditeurs et par les chefs. « Quand tu veux te débarrasser de ton chien, tu dis qu’il a la rage. »

Le courage de Jérémie annonce celui de Jésus. Il est un appel qui nous est adressé. Tenir la vérité quoi qu’il en coûte. Accomplir notre devoir sans regarder à droite ni à gauche. Ce ne sont pas les autres qui doivent décider de notre comportement, mais le désir d’accomplir ce que Dieu nous demande.

Je suis touché par le verset 12 : « fais-moi voir la revanche que tu leur infligeras, car c’est à toi que j’ai remis ma cause ». La manière dont Dieu nous venge ne peut être que juste. Aussi, je veux suivre l’exemple de Jérémie – et celui de Jésus – je me garderai, avec la grâce de Dieu, de chercher à me venger en quelque façon de celui qui me fait ou qui me veut du mal. Je suis invité, par Jérémie, à faire confiance en Dieu. « C’est à toi, Seigneur, que j’ai remis ma cause » (20,12).

Seigneur Jésus, tu as donné à Jérémie et à tant d’autres le courage de tenir bon, de garder courage et de ne pas fléchir devant le mal et devant ceux qui le promeuvent. En ce temps de passion, nous te demandons humblement : Ne nous laisse pas entrer en tentation, mais délivre nous du Mal. Amen.

Mgr Emmanuel Lafont