« Le Corps et le Sang du Seigneur sont la seule nourriture capable de nous rassasier. »

L’évangile que nous avons lu, nous parle de multiplication des pains. On voit qu’avec un apport dérisoire (5 pains et 2 poissons), le Seigneur nourrit une foule considérable plus de 10 000 personnes puisqu’on dit 5 000 hommes sans compter les femmes et les enfants. Ce miracle renvoie à un don encore plus grand selon Jésus lui-même : S’adressant aux juifs qui le recherchait à cause de ce miracle Jésus leur dit : « Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd mais pour celle qui se garde jusque dans la vie éternelle, celle que vous donnera le Fils de l’homme » et il ajoutera plus loin : « Je suis le pain de vie. Qui vient à moi n’aura jamais faim ; qui croit en moi n’aura jamais soif. »

Ce texte nous invite à réfléchir sur la question de la nourriture et il parle de deux types de nourriture.

La nourriture matérielle solide et liquide est le premier besoin de l’homme. Nul ne peut vivre longtemps sans manger et sans boire. Et d’ailleurs, pour être en bonne santé, il faut manger correctement, de la bonne nourriture et de façon diversifiée de telle sorte que notre organisme puisse y puiser tout ce dont il a besoin.

La bonne nourriture s’accompagne de plaisir, on peut dire qu’au sein de la faim primaire se greffe une faim qui est plus culturelle, celle du plaisir que procure la nourriture, on parlera de gastronomie. C’est encore quelque chose de matériel même si cela a une dimension culturelle. Ce plaisir gastronomique n’est pas indispensable à l’acte de se nourrir mais peut apporter une certaine joie ; il y a d’autres plaisirs qui sont culturels et donc liés au matériel par exemple : écouter de la bonne musique, voir des œuvres d’art, des films.

Mais nous les humains n’avons pas que des faims matérielles voire culturelles avec leurs cortège de plaisirs. Cela ne nous suffit pas tout simplement parce que nous avons une dimension proprement spirituelle. Il y a des gens comme Servio Berlusconi qui lui aussi est milliardaire (à ce que l’on dit) à qui cela ne suffit pas d’être riche et qui manifestent une faim de pouvoir pour laquelle ils sont prêts à déployer une incroyable énergie et sans doute prêts à dépenser beaucoup d’argent. D’autres personnes ont faim d’être reconnues, acclamées. Ce sont là des nourritures immatérielles, mais des nourritures pour lesquelles certains sont prêts à risquer leur vie ; je pense à certains sports extrêmes et même aux petits jeunes qui cabrent leurs motos en toutes circonstances pour être admirés. On voit bien que l’âme a aussi ses nourritures.

Mais est-ce que ces nourritures-là peuvent la rassasier ? Il semble bien que non, puisqu’on a connu des gens gavés d’honneurs, d’applaudissements et même adulés pour certains et qui mettent fin à leurs jours. Le célèbre Mike Brant en est un exemple éloquent. Si le matériel avec ses plaisirs, si le pouvoir, si les honneurs et les acclamations ne peuvent combler un cœur humain, que reste-t-il ? Qu’est-ce donc qui peut rassasier notre âme ?

Et c’est là que Jésus arrive en disant : « Je suis le pain de vie qui descend du Ciel. Qui vient à moi n’aura jamais faim ; qui croit en moi n’aura jamais soif. » Seul Dieu peut combler une âme humaine parce qu’elle est créée à son image et en capacité à le recevoir. Tant qu’il n’est pas en nous, notre soif et notre faim sont sans remède. On peut citer la célèbre phrase de saint Augustin : « Tu nous a créés pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi ». Cela dit la même chose. La réponse à cette faim et à cette soif est donc Jésus lui-même. Le Verbe, il a été dit : l’homme ne vivra pas seulement de pain mais de toute parole qui sortira de la bouche de Dieu. La Parole qui sort de la bouche de Dieu, c’est son Verbe, c’est Jésus. C’est cette parole que nous recevons par les saintes écritures et par le pain et le vin sur lequel a été faite une invocation du Saint-Esprit. Prenez et mangez, dit Jésus, ceci est mon corps livré pour vous.

J’ai envie de dire : Bon appétit… à manger Dieu !

+Mgr Alain RANSAY, évêque de Cayenne