Tu es venu pour nous perdre ?

« Deux possédés sortirent du cimetière à sa rencontre ; ils étaient si méchants que personne

C)

ne pouvait passer par ce chemin. Et voilà qu’ils se mirent à crier : ‘Que nous veux-tu, Fils de Dieu ? Es-tu venu pour nous faire souffrir avant le moment fixé ?’ »

 

Matthieu 8,28-34

 

Jésus est parti sur l’autre rive du lac, c’est-à-dire en pays païen. Un signe ne trompe pas, c’est la présence d’un troupeau de porcs, animaux impurs et inexistants en terre juive. Il y rencontre deux personnes possédées du démon.

 

La description qui en est faite est instructive de ce qu’est le péché. Ces gens-là vivent dans un cimetière. C’est un lieu de mort. Le péché n’est autre qu’une antichambre de mort, une sorte de mort avant la mort, une séparation des autres. Vous connaissez le sens du mot « diable ». Il vient du grec, diabolos, le diviseur ! Mais les deux êtres ne sont pas seulement isolés, ils sont inatteignables. Personne ne pouvait passer par ce chemin… Le péché dénoue les liens humains. Il creuse comme un fossé infranchissable entre les gens.

 

Coupés des autres, les deux possédés – ou plutôt les démons qui les possèdent – sont également effarés de se trouver face à Dieu ou à son représentant. Aussi l’arrivée de Jésus est à la fois attirance et repoussoir : Que nous veux-Tu ? Es-tu venu pour nous faire souffrir ? Ils savent que leur situation est précaire, mais ils n’ont aucune envie de l’abréger. Le péché écarte de Dieu. Le pécheur sait bien ce qu’il doit faire, mais il le refuse, et du coup, il se méfie de la voix de la conscience et du Maître des cœurs.

 

Le péché ne sort pas de l’homme seul. Il y a en lui un esprit, extérieur, qui le pousse au mal et à la division. C’est un esprit menteur. Jésus peut nous en guérir. Tel est le sens de son ordre : « Allez dans les porcs… ».  Jésus peut nous en délivrer, car ils ne sont pas nous !

 

Seigneur Jésus, que cette méditation aujourd’hui m’aide à haïr le mal et tout ce qui me sépare des autres, de moi-même, et de ton Père. Et que je fasse confiance à ta miséricorde inépuisable. Tu le sais, le mal vient de derrière moi. Que ton amour me libère !

 

† Emmanuel Lafont

Evêque de Cayenne