Prenez un agneau

« Vous prendrez un agneau ou un chevreau 

… on l’immolera au coucher du soleil.

On prendra du sang, que l’on mettra

sur les deux montants et sur le linteau »

Exode 12,1-8.11-14.

La liturgie chrétienne de l’Eucharistie plonge ses racines directement dans la liturgie juive de la Pâque, que rapporte Exode 12. Ce récit n’est autre que le rituel bien connu et aimé de Jésus : « Je désirais beaucoup manger cette Pâque avec vous avant de souffrir » (Luc 22,15), avait-il déclaré à ses apôtres. Reportons-nous à l’histoire : au moment où Dieu préparait la dixième plaie contre l’Égypte, celle où disparaîtraient tous les premiers nés, du fils du pharaon au dernier-né du bétail, les Hébreux sacrifient une bête, dont le sang, répandu sur le linteau de leur maison, protège leurs enfants de l’ange exterminateur.

Chaque année, les Juifs pratiquent la liturgie familiale du repas de la Pâque : on y mange l’agneau rôti, les pains sans levain et les herbes amères, on y boit le vin de la joie de la liberté. Au cours du dernier repas de Jésus avec ses disciples, il vient de refaire ces gestes qui célèbrent la libération des esclaves. Et puis, soudain, il reprend le même pain azyme et lui donne un sens tout nouveau : il le distribue à ses disciples en disant « Ceci est mon corps, livré pour vous ». Puis il reprend la coupe de vin, la fait passer à tous et déclare : « Ceci est la coupe de mon sang, versé pour vous et pour la multitude, en rémission des péchés… ». Subitement, les mêmes symboles tournent les apôtres non plus vers le passé, mais vers l’avenir : le Golgotha.

Jésus ne reprend pas l’agneau, mais seulement le pain et le vin. Car, désormais, ce pain et ce vin consacrés deviennent l’Agneau Pascal, Le Christ lui-même, immolé sur la croix. C’est par lui que nous sommes libérés de l’esclavage du péché et de la mort. Il a accompli son sacrifice une fois pour tous. Nous ne faisons plus aucun sacrifice. La messe est l’actualisation aujourd’hui, sur l’autel, de l’unique sacrifice offert par le Christ sur la croix, vendredi saint.

Seigneur Jésus, tu as renouvelé et porté à son accomplissement définitif le rite de la Pâques, béni sois-tu ! Désormais, par ton précieux Sang, Agneau pascal, nous sommes délivrés de tous les esclavages humains et spirituels, nous sommes délivrés du péché et de la mort. Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde, prends pitié de nous et donne-nous la paix.

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane