Puis il sortit en s’en alla vers un autre lieu

« Pierre revint à lui, et il dit : ‘Maintenant

je me rends compte que c’est vrai : le

Seigneur a envoyé son ange, et il

m’a arraché aux mains d’Hérode’ »

Actes des Apôtres 12,1-23.

En la solennité des Saints Apôtres Pierre et Paul, la liturgie de l’Eglise nous fait relire un passage étonnant du livre des Actes. Appelé « Actes des Apôtres » dans toute la tradition, il a été nommé « Actes des deux Apôtres » par un grand exégète moderne. En effet, Pierre domine la scène du chapitre 1 au chapitre 12, tandis que Paul prend le relais du chapitre 13 au chapitre 28. Ils se trouvent ensemble, cependant, pendant l’Assemblée de Jérusalem, au chapitre 15.

A part le chapitre 15 donc, l’événement que nous méditons aujourd’hui est le dernier concernant Pierre. Mis en prison et condamné à mort, il est miraculeusement libéré par un ange. La suite du texte (versets 12-18), très énigmatique, se termine par le verset 17 où il est dit qu’ « il sort et se dirige vers un autre endroit… »

La meilleure manière de bien comprendre ce récit consiste à le comparer au récit de la mort et de la Résurrection de Jésus. Depuis le début du livre des Actes, l’auteur compare sans cesse la vie des apôtres à celle de Jésus, pour nous faire saisir qu’ils continuent la mission du Maitre et son destin. Cela se passe ici.

Le récit raconte, d’une manière voilée, que Pierre va mourir. Il est arrêté comme Jésus, à la veille de la pâque (Actes 12,3-5). Il est promis à la mort, comme Jésus (cf. Actes 12,2-3). Cependant, il ne reste pas dans les liens de la prison. Il est miraculeusement sorti de prison par un ange comme Jésus est sorti du tombeau (Actes 12,6-11). Lui-même se demande ce qui lui arrive (Actes 12,11). À son retour vers la maison d’une Marie, la mère de Jean surnommé Marc, il  sont en prière, c’est d’abord une femme qui sort et qui le reconnait (Actes 12,13-14), comme les femmes qui étaient allées au tombeau de Jésus. Dans sa joie, la servante n’ouvre pas la porte mais va donner la nouvelle aux disciples (Actes 12,14). Comme les femmes de retour du tombeau, elle n’est pas crue non plus par des apôtres incrédules, comme au moment de la résurrection de Jésus ! (Actes 12,15).

Lorsqu’enfin Pierre paraît, les gens sont dans la stupéfaction, comme l’avait été les disciples devant Jésus ressuscité (Actes 12,16). Pierre alors envoie ses amis en mission vers les Apôtres (Actes 12,17) avant « de sortir et de s’en aller, mystérieusement, vers un ‘autre lieu’ ». Enfin, les gardes de Pierre sont sanctionnés, mais Hérode ne peut plus mettre la main sur lui. Il sera lui-même mystérieusement frappé à mort (Actes 12,18-23)…

Ce récit du chapitre 12 raconte symboliquement la mort de Pierre et sa glorification au Ciel, comme Jésus !

Cela correspond bien à la manière de Luc, l’auteur du Livre des Actes. D’une part, il aime bien en finir avec un personnage avant d’entamer l’histoire d’un autre. Ainsi, par exemple, il fait mourir Jean-Baptiste avant le baptême de Jésus (cf. Luc 3,20). De même, il fait disparaître Pierre avant que Paul ne commence sa mission (Actes 12,17). D’autre part, il raconte l’histoire des Apôtres comme une imitation constante de la vie et de la mort de Jésus, comme ici avec Pierre, ou plus tôt avec Etienne (cf. Actes 7,55-56.59-60).

Seigneur Jésus, tu nous as promis que nous devrions suivre tes traces, continuer ta mission, donner notre vie comme toi, et parvenir dans ton Royaume. Tu as largement accompli ta promesse envers tous les saints, Pierre, Paul et les milliers de saints et de bienheureux, et tu nous promets la même récompense ; Béni sois-tu ? Ne permets pas que nous renoncions à une si belle mission !

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane