Les disciples de Jean vinrent prendre son corps

EVANGILE

MARTYRE DE SAINT JEAN-BAPTISTE – 29 AOÛT

 

« Le garde s’en alla décaper Jean dans la prison. Il apporta la tête sur un plat, la donna à la jeune fille, et la jeune fille la donna à sa mère. Ayant appris cela, les disciples de Jean vinrent prendre son corps et le déposèrent dans un tombeau »

Marc 6, 17-29

Celles et ceux qui ont vu la grande fresque de Robert Hossein sur Une femme nommée Marie n’oublieront pas la superbe danse de la fille d’Hérodiade sur l’esplanade de la basilique du Rosaire. Pourquoi l’auteur a-t-il inclus cette scène parmi les 21 tableaux évangéliques choisis pour nous présenter l’essentiel de l’Evangile ? En raison de la personnalité du Baptiste, dont la mort comme la vie étaient données à sa mission d’annoncer le Messie.

« Jean avait témoigné en naissant que le Christ allait naître ; en prêchant, il avait enseigné que le Christ allait prêcher ; en baptisant, qu’il allait baptiser. En souffrant le premier la passion, il signifiait que le Christ devait lui aussi souffrir » (St Bède le Vénérable). Victime de son amour du bien et de son courage, Jean n’a pas eu peur de déplaire afin de rappeler à un grand de ce monde, le tétrarque Hérode, que la loi du Seigneur était la même pour tous, petits et grands.

Le récit de Marc est superbe. Il dévoile en Hérode une personnalité complexe, fasciné par le prophète, mais sous influence de ceux qui le flattaient. Il a mis Jean en prison, tout en sachant que la vérité l’habitait. Le Baptiste n’avait pas caché l’horreur que lui inspirait le comportement du roitelet qu’était Hérode. Et pourtant, il l’écoutait avec plaisir. Il y avait en lui, comme en chacun, une part de bonté, de vérité, de reconnaissance du bien et du mal.

Ce mal qu’on ne parvient pas à éviter, ce bien qu’on ne réussit pas à accomplir ; « malheureux homme que je suis ! Qui donc me délivrera ce corps qui m’entraine à la mort ? » (cf. Romains 7,24). Entre le roi tout puissant et l’humble prophète du désert du Jourdain, c’est bien le second qui a su, « renoncer à lui-même, prendre sa croix et suivre le Christ » (cf. Mt 16, 24). Il y a chez Hérode aussi une parcelle de vérité…

Et que pouvait-il se passer dans la tête de la jeune fille, tandis qu’elle portait la tête du Baptiste à sa mère ? De la fierté ? De la honte ? quand je fais ce que Dieu réprouve, je ressens toutes sortes de pensées contradictoires, tantôt pour me tranquilliser, tantôt dans l’effroi du péché commis… Et Dieu est là, qui attend de ma part la confession humiliante et pacifiante… A qui refusera-t-il cette grâce ? Par le Sang de Jésus, à personne qui la lui demande.

« Père, pardonne-leur. Ils ne savent pas ce qu’ils font » (cf. Luc 23,34). Si Jean est le précurseur du Christ dans sa mort, il a dû l’être aussi dans le regard porté sur Hérode, au moment où ce dernier le fait décapiter. Qui sait même si Hérodiade également, prisonnière de son sentiment de culpabilité, n’a pas davantage cherché à se protéger qu’à tuer ? Mystère de la mort de Jésus, qui éclaire de sa flamme étincelante toutes les autres morts martyres…

Il reste que les martyrs le sont parce qu’ils ont rendu témoignage à la Vérité, c’est-à-dire à Jésus et à son Père. Ils n’ont pas faibli, ils n’ont rien caché. Ils n’ont cherché ni à juger ni à se montrer arrogants. Ils ont témoigné de la vérité, parce que c’est elle qui rend libre (cf. Jean 8,32).

Seigneur Jésus, nous te remercions pour la force et le courage que tu as donné à Jean, ton précurseur. Il a marché au-devant de toi. Que son exemple et sa prière nous donne de renoncer à nos volontés propres pour marcher aujourd’hui à ta suite, confiants dans la protection que tu ne manques jamais d’accorder à tes amis.

† Emmanuel Lafont

Evêque de Cayenne