Qui donc faiblit sans que je partage sa faiblesse ?

Première lecture

Vendredi, 11ème semaine du temps de l’Église

« J’ai connu la fatigue et la peine, souvent les nuits sans sommeil, la faim et la soif, les journées sans manger, le froid et le manque de vêtements, sans compter tout le reste : ma préoccupation quotidienne, le souci de toutes les Églises. Si quelqu’un faiblit, je partage sa faiblesse ; si quelqu’un vient à tomber, cela me brûle. Alors, s’il faut des motifs d’orgueil, c’est dans les signes de ma faiblesse que je mettrai mon orgueil.»

2 Corinthiens 11,18.21-30.

JE VOUS INVITE À MÉDITER AUJOURD’HUI 2 CORINTHIENS 11,16-33.

Face à ceux qui le méprisent et le dénigrent, Paul n’hésite pas à se vanter. Il énumère d’abord ses qualifications : il est hébreu, israélite, descendant d’Abraham, ministre du Christ ! (11,22-23). Comme ministre, il détaille tout ce qu’il a enduré, combien plus que tant d’autres, parmi ceux qui le critiqnet : l’énumération des épreuves subies pendant son ministère pastoral itinérant dépassent de loin la moyenne (11,23-27). Ils sont nombreux et les Actes des Apôtres ne nous ont pas tout dit. La résilience de Paul, son courage et sa détermination forcent notre admiration.

Ses qualités sont constantes, d’ailleurs, comme on peut s’en rendre compte en suivant le récit des Actes sur le son retour à Jérusalem : Actes 22-23. Il ne fuit jamais le danger, lorsque la mission est en jeu. Il ira jusqu’au bout, et au bout, il sera décapité.

Son courage ne retire rien à sa proximité avec son peuple, on dirait même que c’est tout le contraire. Il a le souci des personnes, plus encore que des situations. Il peut se tromper. On devine, dans son tempérament, une force qui parfois peut écraser, manquer de souplesse ou d’écoute… Mais son cœur est entièrement à ceux qu’il évangélise. Peut-être même trop parfois. On pourra alors reprocher à Paul son ego, sa rudesse, mais certainement pas son manque de cœur. Les gens ne s’y trompent pas : ils pardonnent à celui qui les aime.

A la suite de sa plaidoirie, il parle de la faiblesse. D’abord il dit partager la faiblesse de ceux qui en sont tombent. Il communie profondément aux épreuves des siens (11,29). Elles lui importent davantage que les siennes. Ceci est fondamentalement une attitude parentale, paternelle et maternelle, et c’est bien la posture que revendique Paul vis-à-vis des communautés qu’il a fondées. La faiblesse des autres le renvoie à la sienne propre (11,30), faisant allusion au moment où il a dû fuir Damas (cf. 11,31-32).

Tout ceci révèle la profondeur du cœur de Paul, mais aussi la blessure qu’il porte. Les attaques dont il fait l’objet ne le laissent pas indifférent. Il est blessé ; il est humain. Son cœur est ouvert et peut saigner. Comment oublier cela lorsque nous jugeons nos frères et sœurs, lorsque nous jugeons les ministres de notre Église ? Là se trouve sans doute la nouveauté absolue de l’Évangile : l’autre, quelle que soient les circonstances de la vie, les drames et les erreurs, l’autre doit toujours être regardé comme un frère, une sœur, et être traité comme tel. Personne n’est un « cas ».

QUI DONC FAIBLIT, SANS QUE JE PARTAGE SA FAIBLESSE ?

Seigneur Jésus, donne à tes serviteurs, particulièrement à tes évêques et à tes prêtres, un cœur rempli d’amour et de tendresse envers ceux que tu confies à leur zèle pastoral.

Emmanuel Lafont, évêque émérite