« La Samaritaine »

Que signifie « adorer Dieu en esprit et en vérité » comme nous y invite Jésus dans l’évangile de ce troisième dimanche de Carême ? Se peut-il que l’on adore Dieu « charnellement » et dans le mensonge ?

Adorer Dieu « charnellement » voudrait dire que l’on n’adore pas Dieu pour lui-même mais pour nous-mêmes ; au sens où l’on ne vise que nos intérêts charnels. Par exemple, on l’adore pour se faire voir, ou bien parce que l’on veut se concilier ses faveurs… Mais, au fond, on n’aime pas Dieu. Les Aztèques offraient des milliers de personnes en sacrifices à leur dieu assoiffé de sang. Mais ils ne devaient pas l’aimer ;  ils cherchaient à écarter sa colère d’eux et à obtenir ses faveurs. Parfois, on fait la même chose avec Dieu, on cherche des recettes pour obtenir ses faveurs ; on ne va pas sacrifier des êtres humains, (heureusement !) mais on va acheter tant de bougies, de telle et telle couleur, on va réciter telle et telle prière dans l’optique d’obtenir un « résultat », on va prendre des bains assaisonnés d’ingrédients divers, etc. Quand on intègre une secte, ou que l’on va voir des « gadô », c’est pareil, on veut un « résultat », quel que soit le prix car ces gens-là nous promettent monts et merveilles et des « résultats » garantis, mais ce n’est jamais gratuit…

On comprend que des personnes qui sont dans la détresse soient tentées par ce genre de démarche. Quand on souffre, et qu’on n’a pas une foi assez grande, on peut s’y laisser entraîner. Je ne juge personne, cependant, ce n’est pas adorer Dieu en esprit et en vérité, mais plutôt charnellement et dans le mensonge. Charnellement parce qu’on ne vise que ses intérêts immédiats et qu’on s’est éloigné du vrai Dieu, dans le mensonge car ces « esprits » que l’on invoque sur nous ou même ces soi-disant « prières » adressées à Dieu que l’on nous donne ne sont pas conformes à l’évangile ou sont détournées de l’usage que l’on doit en faire.

Adorer Dieu en esprit et en vérité, c’est adorer Dieu avec amour. C’est l’aimer pour lui-même. De la même façon que l’on aime son père ou sa mère. Si je demande quelque chose à mon père ou à ma mère, ce n’est pas pour les exploiter ou les manipuler, c’est parce que je suis sûr de leur amour pour moi et que je suis dans le besoin. Concernant notre Dieu, il peut tout, mais il voudrait que nous le traitions, non comme comme un distributeur automatique de faveurs, mais comme un Père…

+ Mgr Alain Ransay, évêque de la Guyane