“Jésus nous obtient le pardon et la glorification”

Lors de retraites de couples, j’ai été témoin, de ce qu’un mari, ou une femme, ait avoué à son conjoint une infidélité passée. Quel choc violent ! C’est sans doute une des blessures les plus terribles que l’on puisse s’infliger dans un couple. Mais, avec la prière et l’accompagnement des frères et des sœurs, le conjoint trahi a pu pardonner et j’ai été aussi témoin de voir que, par la suite, la relation d’amour, entre les époux qui se sont pardonnés, était devenue encore plus profonde et plus belle qu’avant la trahison. 

J’évoque ce souvenir parce qu’il a un lien avec l’évangile de ce dimanche. Il s’agit du Pardon que Dieu nous offre et qui peut rendre notre alliance avec lui beaucoup plus belle qu’avant nos fautes parce que le pardonné réalise plus qu’un autre combien il est aimé. Pour bien comprendre cet évangile, il faudrait lire le chapitre 16 du livre du Lévitique. De quoi y est-il question ? Du Yom Kippour, c’est-à-dire du Jour du Grand Pardon. Il s’agit d’une fête annuelle perpétuelle qui vise à renouveler l’Alliance de Dieu avec son Peuple, alliance mise à mal par la partie humaine à cause de ses infidélités.

En ce grand jour, pour faire court, le grand prêtre immolait un jeune taureau et deux boucs pour ses propres péchés, ceux de son clan et ceux du peuple… Avec le sang du taureau et du bouc, qui étaient immolés, le grand Prêtre en aspergeait une plaque d’or fixée sur l’Arche d’Alliance, lieu de la présence divine puis, il aspergeait en quelque sorte le peuple en aspergeant la tente de la rencontre, -lieu où le Peuple se tenait habituellement pour la prière. Ainsi tous les péchés de l’année étaient purifiés par ce sang devenu sacré à cause du contact avec la présence divine supposée être sur l’Arche.

C’est en soi déjà touchant comme démarche, reconnaît le vénéré pape Benoît XVI, mais Jésus va plus loin, car si, comme le Grand Prêtre de l’Ancienne Alliance, il prie pour lui-même, pour les siens, et pour le Peuple, il n’offre pas le sang de taureau ni de boucs car c’est son sang qui sera versé pour la rémission des péchés.

De fait, le grand Prêtre entrait dans le Saint des saints avec le sang des animaux immolés, mais l’auteur de la lettre aux hébreux (Hb 9) nous dit que Jésus est entré dans le véritable Saint des saints, c’est à dire dans la présence de Dieu, non pas avec un sang d’animal, mais avec son propre sang. Ainsi, on comprend que dans sa prière Jésus dise : « Père, Glorifie ton Fils, donne-moi la Gloire que j’avais auprès de toi. Pour le dire autrement : « Fais-moi entrer dans ta présence qui est le véritable Saint des saints ». Et le Christ ajoute, à propos de nous le Peuple de ceux qui croiraient en lui : « Que je sois glorifié en eux ». Autrement dit que nous manifestions la sainteté de Dieu et que, nous aussi, soyons pris dans la sphère du Dieu Très Saint, que nous partagions la vie de Dieu, la vie éternelle, la vraie vie.

Ainsi le sang de Jésus a une efficacité que n’a pas celui des animaux. Non seulement il nous purifie de nos péchés mais il nous fait manifester la sainteté de Dieu et nous introduit déjà dans sa gloire, dans sa vie divine. Il n’est plus besoin de faire de nouveaux sacrifices désormais, celui de Jésus est définitif, il suffit de se brancher sur lui et c’est ce que nous faisons avec l’Eucharistie qui nous rend présent cet unique sacrifice. Oui, son sang versé est disponible dans l’eucharistie mais également dans le baptême, dans la confession et dans tous les sacrements qui sont des fruits du mystère pascal.

Évidement, ce serait une grande impudence de notre part, comme disait un Père de l’Église, si nous refusions aux autres le pardon que nous sollicitons pour nous mêmes auprès de Dieu. Puissions-nous, à l’invitation de Jésus, pardonner à notre prochain avec la même promptitude et la même patience avec laquelle le Seigneur nous fait miséricorde.

+ Mgr Alain Ransay, évêque de la Guyane