« L’amour de ta maison me dévorera »

De quelle maison parle Jésus ? Il semble parler du Temple. Mais la maison de Dieu est plus que le Temple. Car Jésus a dit à la samaritaine que ce n’est ni à Jérusalem ni au mont Garizim — où se trouvaient respectivement le Temple juif et celui des samaritains— qu’il faut adorer Dieu mais « en Esprit et en Vérité ». Jésus avait aussi annoncé la fin du Temple : « viendra un jour où ne subsistera pas pierre sur pierre… »  Quelle est donc cette maison ?

La Bible parle de la « maison d’Israël ». En fait, c’est le peuple qu’il s’est choisi et à qui il a donné la Loi et les prophètes et, ultimement, à qui il a envoyé son Fils unique. Il y a un mystère d’Israël : Dieu en a fait un signe pour les autres peuples ; pas d’un point de vue politique mais religieux. On demande à Jésus quel signe il donne pour justifier son acte de chasser les vendeurs du Temple. Il répond : « Détruisez ce temple et en trois jours je le relèverai ». Saint Jean nous dit qu’il parlait de son corps. Et St Paul nous dit que nous sommes le « Corps du Christ » et qu’il s’agit de l’Eglise. Donc la maison de Dieu est désormais l’Église. Non pas les églises de pierres ou de béton, mais vous et moi —sans oublier tous ceux qui ont déjà quitté cette vie. Jésus a été mis à mort, mais il est ressuscité le troisième jour. Saint Paul nous dit que nous aussi, nous ressusciterons avec lui puisque nous sommes les membres de son Corps.

Est-ce que j’ai cet amour de la maison de Dieu —c’est-à-dire de l’Église— qui dévorait le Christ ? Est-ce que, comme lui, je suis prêt à souffrir pour elle ? Thomas Roberts, pourtant de confession anglicane, sortit en claquant la porte d’une pièce où des protestants critiquaient l’Eglise catholique en disant : « Je n’aime pas que l’on dise du mal de ma mère ». Aujourd’hui, de partout, on la dénigre, on la malmène : médias, certains hommes et femmes politiques, extrémistes, sectes fondamentalistes, etc… Elle est la cible privilégiée du monde entier. « Les fidèles catholiques sont les croyants les plus persécutés dans le monde » disait Bernard Henri Lévy… Est-ce que je me tais quand on la critique, ou bien est-ce que l’amour pour elle me conduit à la défendre ? Suis-je conscient qu’elle est ma mère ? Il y a un grand mystère de l’Église qui fait qu’elle n’est pas simplement une organisation comme une autre, pas plus qu’Israël n’est un peuple comme les autres.

Mgr Alain Ransay, évêque de Cayenne